Une coopération dans les affaires ne tient qu’à des gens. Dans le cas de la Russie et de l’UE elle doit s’appuyer sur les professionnels, sur ceux qui savent ce que sont les affaires et la politique en Russie, en Union européenne et dans ses États-membres.
On dirait un truisme, une chose qui va sans dire. Mais posons-nous une question de savoir s’il y a beaucoup de gens travaillant dans la fonction publique de Bruxelles et des «vingt sept» qui comprennent les réalités et mentalité russes, si ceux des ministères et départements de Russie se rendent bien compte de la façon dont sont coordonnées les compétences de l’Union européenne avec celles des États-membres. Ceux-ci sont peu nombreux, de loin trop peu nombreux.
La prise de conscience de cet état de choses a trouvé son expression dans l’initiative de la création de l’Institut européen éducatif . D’abord, cette idée a été reprise lors des sommets Russie-UE. Ensuite, elle a été consacrée par la «Feuille de route de construction d’un espace de science et d’éducation y compris des aspects culturels», les sommets ayant attribué à cette nouvelle école supérieure à constituer un mandat bien précis, celui de la formation continue et du recyclage des fonctionnaires, destinés essentiellement au rapprochement de la Russie et de l’UE.
La création de l’Institut européen éducatif et le soutien de son fonctionnement ont fait l’objet d’un important projet conjoint de la Russie et de l’Union européenne. L’Institut a servi d’une bande d’essai pour tester une approche de coopération mutuellement avantageuse et orientée vers l’avenir. C’est l’exigence de parité en matières financières, institutionnelles et de contenu qui est devenue l’élément constitutif de toutes les décisions qui ont été soumises à l’expérimentation. Cette exigence est respectée en matière du financement de l’Institut : l’UE affecte à son budget exactement le même montant que la Fédération de Russie. Son budget a permis de constituer un Conseil directeur sur une base paritaire, qui comprend le même nombre de représentants des ministères et des milieux scientifiques de la Fédération de Russie, ainsi que de ceux des pays de l’UE. Le processus éducatif est imprégné de cet esprit de parité, des professeurs des universités et des centres scientifiques de pointe, ainsi que des praticiens des deux parties étant invités pour faire des conférences et donner des cours.
La décision préparée et prise, ainsi que sa mise en œuvre ont mis très peu de temps. Les premiers cours pilotes ont eu lieu fin 2005, en 2006 l’Institut fonctionnait déjà. Une fois tous les accords pertinents signés et les textes afférents approuvés, il y a eu une inauguration solennelle de l’Institut. Sa date de naissance, c’est le 23 octobre 2006. Ont participé à la cérémonie d’inauguration de l’Institut le Ministre des affaires étrangères de Russie M. S.V.Lavrov, le représentant spécial du Président pour les relations avec l’UE M. S.V. Yastrjembski et le Commissaire à l’activité extérieure de l’UE Mme Bénita Férerro-Valdner. En automne 2009, l’Institut aura trois ans. Nous envisageons de célébrer cet anniversaire par une conférence internationale, minutieusement préparée et bien planifiée, consacrée à de nouvelles tendances des processus intégrationnistes au continent et à leur influence sur les relations entre la Russie et l’UE. Nous invitons tous à cette conférence, qui désirent mettre à jour leurs connaissances en la matière.
Trois ans est un âge de bébé. Toutefois, grâce à ses illustres parents, l’Institut ressemble un peu à Hercules de par ses devenir et développement. Une nouvelle école supérieure existe bien. Son activité est efficace et bénéfique.La création de l’Institut européen éducatif est, sans doute, un facteur positif de la coopération entre la Russie et l’UE. L’attitude envers l’Institut témoigne de la maturité du partenariat bilatéral.
En répondant à la question de savoir comment, en un temps si court, il a été possible de parvenir à un si bon résultat, je voudrais expliquer que tout tient à la pertinence du choix. L’Institut européen éducatif existe auprès de l’Institut de l’État (Université) des relations internationales de Moscou. Il a pu s’appuyer sur les capacités matérielles de l’université MGIMO (U). Avant la mise en exploitation d’un nouvel édifice, futurs locaux de l’Institut européen éducatif, celui-ci se sert de salles et locaux du MGIMO (U).
Mais l’essentiel ne consiste pas seulement et tellement dans les salles de classes . L’essentiel consistait dans le fait que, vers cette époque-là, le MGIMO (U) avait déjà cumulé une riche expérience d’enseignement du droit européen et de l’intégration européenne. Créé à l’Université MGIMO (U) l’Institut de droit européen avait constitué de fait une école scientifique d’enseignement de cette discipline. La chaire de l’intégration européenne jouit d’une grande autorité, sa naissance est due aux efforts conjoints du MGIMO (U) et de l’Institut de l’Europe de l’Académie des sciences de Russie. Comme on le voit, tout avait été préparé, à l’époque, à poser et à résoudre des objectifs nouveaux.
C’est déjà la troisième génération d’élèves qui suivent les cours de l’Institut européen éducatif auprès du MGIMO (U) et qui sont envoyés par différents ministères et départements de Russie. 48 personnes ont terminé leurs cursus de master en 2007, 84 représentants de ministères et de départements sont devenus titulaires de diplômes de master en 2008. L’année scolaire en cours a réuni plus de 100 personnes faisant partie de la promotion 2009. Or, ce ne sont que des cursus de master où les élèves assimilent le droit, l’économie et la politique de l’Union européenne. Par ailleurs, l’Institut dispense différents cours de brève durée qui permettent d’avoir, en une quinzaine de jours, une idée générale de la façon dont fonctionne l’Union européenne, de comprendre les bases du système intégrationniste et ses particularités économiques, de discuter les problèmes les plus actuels qui préoccupent à présent les structures étatiques ou le monde des affaires.
Il est nécessaire de nous appesantir sur le partenaire privilégié de l’Institut . C’est le Collège d’Europe. Le Collège a été célèbre par le passé et il l’est maintenant par le fait qu’il fournit du personnel pour la fonction publique de l’Union européenne. J’espère que le terme de «collège» ne vous gêne pas. L’établissement d’enseignement supérieur dont je parle a été créé au lendemain de la Deuxième Guerre Mondiale pour résoudre les problèmes d’intégration les plus compliqués auxquels faisaient face les ex-ennemis. Ce sont seulement des adultes, titulaires de diplômes universitaires supérieurs, ayant déjà fait leur choix dans la vie qui peuvent étudier au Collège, comme à l’Institut européen éducatif. La majeure partie des professeurs étrangers enseignant à l’Institut sont sélectionnés et envoyés à Moscou par le Collège. Les cursus éducatifs de l’Institut et du Collège sont très similaires. La différence de principe consiste en ceci qu’en faisant un cours magistral sur l’Union européenne les enseignants russes comparent les lois, procédures, mécanismes et jurisprudence caractéristiques de la Russie et de l’UE. Ceci étant, une attention particulière est accordée à l’analyse des relations entre la Fédération de Russie, l’Union européenne et ses États-membres.
Toutefois, il ne faut pas percevoir l’appréciation positive de l’activité de l’Institut européen éducatif auprès du MGIMO (U) comme une tentative de fermer les yeux sur des problèmes existants qui ne sont pas des moindres dont il ne sera pas facile d’en venir à bout. Signalons en quelques’uns. Il faut que les étudiants de l’IEE maîtrisent mieux les langues de travail de l’Union européenne. Il y aura beaucoup à faire pour que leurs différents niveaux ne les empêchent pas d’assimiler les matières. Il est important de créer des conditions meilleures de formation pour qu’il y ait moins de retards. L’administration de l’Institut compte, à cet égard, sur le soutien des services des ressources humaines des ministères et départements, d’autres structures intéressées. Il sera aussi extrêmement important de maintenir un esprit de liberté académique qui y règne maintenant que les professeurs de différents pays, à partir de leurs propres expériences de vie et différentes vision du monde, donnent aux élèves un panorama de problèmes et des possibilités de les voir sous différents angles.
Une Stratégie nouvelle de développement de l’Institut pour les années 2010 à 2013 précise des objectifs de perfectionnement du processus d’enseignement, d’amélioration du climat d’enseignement. La Stratégie parle aussi de la nécessité d’élargir la panoplie de services éducatifs que l’Institut aura à fournir dans l’avenir. Le Conseil directeur considère ce texte comme un véritable programme d’actions pour les trois ans à venir et à plus long terme.
Il est nécessaire, dès lors, que le sommet suivant Russie – UE ou les autorités russes et celles de l’UE prennent la décision de poursuivre la mise en œuvre du projet conjoint, qui a fait ses preuves, de soutenir l’Institut et de le financer. Ceci nous permettra d’inviter non seulement cette année-ci mais aussi par la suite tous ceux qui travaillent déjà dans le contexte des relations entre la Russie et l’Union européenne ou ont l’intention de relier leur sort professionnel avec cette activité, d’aller étudier à l’Institut européen éducatif pour suivre soit un cursus de master, soit des cours de brève durée.
Pour plus de détail, voir les sites de l’IEE www.eurocollege.ru ou www.ru-eu.ru, ainsi qu’en feuilletant les pages de la revue «Toute l’Europe.ru» — www.alleuropa.ru, www.ru-eu.ru.
Directeur de l’Institut européen éducatif auprès du MGIMO (U)
Min. des affaires étrangères de Russie,
docteur en droit, professeur, M. M.L.Entine